Nakajima Hana - Rompez soldat

Les années ont passé papa. Repose toi papa. Souris papa.

Il y a bien longtemps, au cœur du Japon féodal , les samouraïs étaient respectés.
Honneur, fierté, un immense respect engendré pour des soldats sans compassion, qui mettaient leurs émotions de côté.
Et c'est sûrement ce que cet homme tendait à être. Un samouraï, un homme de la nation, un homme qui se perdait pour son pays. Et il monta, il continuait de monter très haut pour finir connu, médaillé, et encore récompensé. Et cet héritage il voulait le partagé, le passé et voir son nom prospérer dans ce monde.
Mais l'hiver ne lui donna pas ce qu'il souhaitait. Et après une grossesse compliquée, intense, bien qu'elle fut remplie d'amour et de douceur de cette mère qui chantait toujours une chanson populaire, une petite fille naquit. Celle qui allait succéder, n'était pas un homme, qui pourrait emmener le nom haut et loin, mais une fille qui se marierait et partirait de la maison, laissant ses parents seuls.
Mais ce ne fut pas le seul malheur qui arriva ce soir là. Les étoiles en témoignaient, la petite fille avait force dans la voix, vivacité dans les membres, mais sa mère sombrait peu à peu. La grossesse fut compliquée, longue, et intense, et ce fut le moment de trop. Après de longues heures de travail le premier souffle de la nouvel être se mélangea avec le dernier de cette mère. Mais le souhait de cette dernière fut exhaussé ; un prénom doux, qui promettait d'éclore et faire attendrir les cœurs de ces hommes trop durs, Hana.

A quel point il est dur pour un père d'élever un son enfant, peu de gens le savent. A quel point il était difficile pour ce père combattant, froid d'élever une fille, les gens commençaient à le comprendre. Les voix circulent aussi vite que le vent portant les paroles d'un bout à l'autre de la ville et cette petite fille qui avait commencé à grandir était devenue un garçon. Oui, les voix chuchotaient que ce n'était pas une fille mais un garçon qui était élevé dans la famille Nakajima. La nouvelle s'était répandue comme une bourrasque s'écrasant violemment contre ton oreille. Tes cheveux courts ne pouvaient pas témoignés le contraire, ces habits manquant de rose, de jupes , de robes. Tu n'avais que huit ans quand tu compris que ton père ne cherchait pas une fille mais un garçon, que sa maladresse à t'élever n'en était pas mais une force qui le poussait à te donner une ligne de conduite à adopter. « Lève la tête, respecte tes aînés, écrase tes ennemis » Ses valeurs étaient les tiennent et peu à peu ses habitudes furent les tiennes.

Pas de sentiments, pas d'embrassades, de toucher. Fille de dix sept ans tu commençais à maîtriser cet art d'être neutre, complètement neutre. Écouter tes aînés, t'abaisser devant tes professeurs mais ne jamais laisser les autres te maltraiter. Même si ce vent de rumeur frappait de nouveau tes oreilles comme une tempêtes. Même si les mots auraient pu te blesser, pas de sentiments, pas d'attache. Les gestes doux ne te connaissais pas et les discussions avec ton père ne semblaient pas plus loin qu'un débriefing avant de début d'une journée. Un compte rendu en fin. Tes cheveux n'avaient pas beaucoup changés non plus arrivant au dessus de tes épaules toujours bien tirés en arrière et attachés. Tu semblais rigide, imperturbable et insensible. C'est ce qu'on avait voulu te faire devenir.

Diplôme en poche tu te souviens encore de ce soir où tu préparais ce grand sac kaki. Des jogging, des tee shirt blancs, noirs, kaki. Des habits confortables et simples. Rien de superficiel. Ce soir, tu partais. Ce soir tu prenais le bus pour te rendre à la capital. Tu te souviens également de ce moment d'hésitation en te saisissant de la photo de ta mère. Une femme aux traits les plus féminins qui soient. Un sourire éclatant et une tendresse dans le regard. C'était trop, ce n'était pas assez. Tes yeux étaient devenus humides et ton nez rougissait d'un mal qui voulait sortir mais qui depuis dix ans restait terré. Et ce mal t'avait presque consumé lorsque tu retournas devant ton père. La première fois que tu voyais de la fierté dans ses yeux fut ce moment. Il était fier que tu partes, que malgré ton sexe tu le suives. Car oui, ce trois janvier 2011 tu partais pour l'armée. Et ce trajet en bus fut le plus long de toute ta vie. Il marquait une cassure impossible avec la vie que ta mère voulait que tu mènes et celle que ton père te poussait à vivre. Aujourd'hui le choix était fait.

Stop baby, Cry cry baby

Tu avais connu des humiliations. Tu avais connu des mots difficiles. Et toujours tu avais gardé la tête haute recadrant parfois quelques un de ces camarades un peu trop sûrs d'eux. Tu avais connu les blagues qui remplissaient ton casier d'ordures, les tags sur ta table. Tu en avais connu des choses mais jamais tu n'aurais pu imaginé ce que tu allais vivre pendant ces années d'entraînement. Peut être que naïvement on pensait que la fille d'un des grands combattants aurait été bien accueillie, chouchoutée. Se fut tout le contraire. Parce qu'il était connu, parce que tu étais une fille, tu subissais la colère inexpliquée contre ta personne de plusieurs personnes. Et tout au long de cet entraînement, tout au long de ces années tu dus leur prouver, plus qu'à toi même que tu n'étais pas là pour regarder le temps passer et te mettre derrière un bureau en portant l'uniforme. Ce treillis, ces décorations, tu les méritais. Et se fut éprouvant mais ils finirent par te respecter. Par voir en toi ce qu'on voyait en ton père. Un sérieux, un sang froid, un sens des responsabilités et une force qu'on ne pouvait détester.
Cela ne fut pas facile pour autant. Et parce que tu fus une fille quand tu avais besoin d'être un homme, tu dus te débattre. Tu passais à côté de ta jeunesse, des amourettes et des après midi au bord de plage, mais tu semblais aimer ça. Sembler fut un bon mot en pensant que jamais une fois tu ne t'étais demandé ce que tu aimerais faire. Pas une seule fois tu avais trouvé ta passion, ce que toi tu voulais faire. Et un jour ce sentiment te rattrapera. Celui d'avoir perdu une vie à jouer à être quelqu'un que tu ne connaissais pas. Un jour ce sentiment te rattrapera et viendra te rendre folle de rage de n'avoir rien vécu et n'avoir que regardé.

C'était bien loin de tout ça. Ces pensés qui auraient pu être celle d'une adolescente n'avaient jamais traversé ton esprit. Et maintenant que l'arme se retrouvait entre tes mains, peu importe ce que tu voulais faire pas vrai ?
Une fois l'arme en ta possession tu devenais leur machine, ne valant pas plus qu'un fusil, qu'une arme blanche ou un véhicule. Tu étais à la nation, pour la nation, mais personne ne se souciait de qui était derrière ces armes. Tu ne connaissais pas la guerre, tu ne connaissais pas les conflits, avant d'être choisie comme sniper. Tes yeux de lynx, ta petite taille, tu étais parfaite pour rester cacher, pour sonner le glas à ces gens si loin. Le premier, la première balle, la première rivière de sang t'avait envie de donner envie de vomir. Et puis tout devint plus facile. Tu n'en avais pas tué beaucoup. Tu ne restas pas longtemps. Mais dans ta tête un tas d'images venaient et repartaient. Le psy te demandait de lui racontait, et ton sang froid, cet air détaché que tu arborais le trompait, jusqu'à ce qu'il te mette sous anti dépresseur. Ce que tu venais de vivre était intense. Ce que tu venais de vivre tu ne l'avais pas voulu. Mais tu ne changeais pas. Parce que les Nakajima ne montraient rien.

Et pourtant ce jour d'été, lorsque le soleil tapait, lorsqu'on t'avait envoyé sur une autre mission. Lorsque tout se déroulait bien mais que tu devais atteindre ton poste. Lorsque tu montais pour te positionner, pas trop équipée, une simple mission dans la capitale afin de protéger des chefs d'états. Loin des champs de guerre que certains vivaient. Loin du bruit de coups de feu tirés dans tous les sens, tu fus blessée.
Pendant cette micro seconde tu ne compris plus rien. Pendant l'espace d'un instant tu semblais ne rien voir, ne rien entendre. La ville avait changé. Le calme et la sérénité qui avait régné si longtemps dans cette capitale était devenue un terrain de jeu. Tu n'avais été qu'un pion. Entre politiciens corrompus, mafia qui s'infiltrait, tu n'avais même pas remarqué que tu n'étais plus du bon côté. Tu n'étais plus protégée. Pendant une seconde la douleur t'épargnas bien que l'arme plantée dans ta côte perçait un chemin pour laisser ton sang s'écouler. Et pendant cette seconde un autre coup te fut porté au genoux détruisant ta carrière. En l'espace d'un instant tout était silencieux. En l'espace d'un instant tu te retrouvas à terre, pensant à tout ce que tu n'avais pas fait, tout ce que tu aurais aimé faire, et rien ne vint à ton esprit. Comme un robot formaté depuis sa création tu avais suivi le chemin du maître. Aujourd'hui cette route t'était barrée et tu devais trouver quelque chose pour vivre, pour survivre dans cette jungle qu'était la vie. Rien n'était plus sûr. Rien ne valait plus le coup de se battre et pourtant. Malgré tout ça. Malgré cette envie de découvrir qui tu étais tu gardais cette part de lui, de ton père, de cette nation. Tu ne la laisserais pas couler sans essayer.

Welcome Home