ada kurose -- crazy in mood

Treize ans. Treize foutues années à se battre de famille d'accueil en famille d'accueil. On lui a dit qu'il avait treize ans, ce jour-là. Alors il a accepté sa date anniversaire, rejoignant par la suite une nouvelle famille. Petit Kurose est si mignon, avec ses cheveux noirs en bataille sur le sommet de son crâne ! Mais personne ne le connait vraiment. Il ne parle que peu, n'exprime, le plus souvent de fois, que des émotions négatives, sans doute bien trop sombres pour les autres familles qui n'ont pas souhaité conserver sa garde.
C'est depuis ses cinq ans que Ada Kurose a été retiré à sa véritable famille. Ses parents ne savaient pas s'occuper de lui ; ils étaient drogués jusqu'à la moelle. Une assistante sociale a débarqué du jour au lendemain pour le retirer de cette ambiance malsaine, impossible pour un enfant de son âge de grandir dans cet environnement. Un foyer quitté pour passer de parents en parents par la suite ; est-ce davantage un environnement rêvé pour grandir et se construire ? Kurose ne parle que très peu de son passé, n'ayant clairement rien à dire par  rapport à cela.
Alors il a tout brûlé. Par le feu, les cendres, la fumée s'est élevée dans toute la maison, brûlant du sol au plafond. Les flammes ont tout emporté... sauf lui. Il a, soi-disant, oublié de fermer la gazinière. Homicide involontaire, qu'ils ont déclaré avant de le verrouiller derrière des barreaux. Il en a pris pour deux ans, en plus d'une amende qu'il devra rembourser à sa sortie et des travaux d'intérêt général qu'il effectue en prison. Mais ce n'était pas si mal, là-dedans. Kurose s'est construit dans l'ambiance sans foi ni loi de l'endroit, commençant lui aussi à se faire sa place en dealant avec ses petits camarades. Il a été l'un des meilleurs, l'un des plus astucieux pour ne jamais se faire prendre.
Ces deux années l'ont forgé plus que jamais, et c'est à ces quinze ans  qu'il sort de cette prison. Il ne retourne pas dans la moindre famille d'accueil, acculé au fond d'un orphelinat où la misère y est bien pire. Rien n'y est bon, Kurose grandit en marge de la société, développant un côté sadique sur ceux qui l'assaillent, les maudissant du plus profond de son âme. Il ne peut partir qu'à ses vingt-et-uns ans où il se retrouve à la rue plusieurs mois. Il côtoie des personnes peu recommandables, mais cela ne lui fait rien, lui qui n'a ni famille ni attache.
Puis, un peu plus tard, c'est un homme âgé, sourd et muet, qui lui ouvre la voie. Il lui tend simplement un peu de riz dans un bol en céramique et lui fait signe de le suivre dans sa maison. Kurose s'adoucit à ses côtés, mais deal toujours pour rembourser sa dette à l'état et à cet homme pour qui il s'est pris d'affection. Ce n'est pas facile, du tout, et Kurose finit par apprendre que son sauveur est sur une liste d'attente pour recevoir un coeur. Un coeur qui n'arrive jamais, et le sien finit par s'éteindre.
Nouveau coup de massue sur la tête. Mais Kurose a vingt-six ans, sa dette est remboursée et avec l'argent de la maison de cet homme décédé, il la transforme en un bar qu'il nomme le Crazy Circus. 'Crazy', car sa vie est une véritable moquerie semblable à sa folie, et 'Circus' car l'homme adorait les cirques. Depuis, ce bar est son refuge, sa maison, son lieu de travail. Aux yeux de la société, Kurose est un homme honnête, mais dans l'ombre, il deal, s'enivre parfois et fait du trafic d'organes. Certaines personnes ont besoin d'un coeur ; et sans doute lui en a-t-il bien davantage que la plupart des êtres humains peuplant cette Terre.